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mardi, décembre 16, 2025
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AFC/M23, Uvira et le processus de Doha : entre conflit armé, protection des civils et recomposition politique en RDC

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L’est de la République démocratique du Congo continue de s’imposer comme l’un des épicentres les plus complexes des crises sécuritaires africaines. Entre violences armées récurrentes, déplacements massifs de populations et échec répété des solutions politiques durables, la région demeure enfermée dans une spirale de conflit. C’est dans ce contexte que l’Alliance Fleuve Congo (AFC/M23) a multiplié ces dernières semaines les prises de position publiques, cherchant à redéfinir son rôle au-delà du strict registre militaire.

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À l’occasion du deuxième anniversaire de la création de l’AFC, son coordonnateur, Corneille Nangaa, a présenté le mouvement comme une « alliance salvatrice », née, selon lui, de l’incapacité prolongée de l’État congolais à garantir la sécurité et la dignité de ses citoyens. Dans ses déclarations, il a rendu hommage aux combattants et aux cadres politiques de l’Alliance, insistant sur la discipline, la détermination et le sacrifice, autant de termes destinés à inscrire l’AFC/M23 dans une logique de lutte de longue durée.

 La centralité de la question civile

Le discours de l’AFC/M23 s’articule largement autour de la protection des populations civiles. Le mouvement affirme que dans des territoires comme Masisi, Walikale, Fizi, Minembwe, Mikenge, Bilalo Mbili, Rugezi, Rusankutu ou Lulenge, les habitants continuent de subir des bombardements quasi quotidiens. À cette situation s’ajoutent, selon l’Alliance, les massacres persistants en Ituri et dans le Grand Nord-Kivu, ainsi qu’un climat d’injustice et de répression dans le Katanga.

Cette mise en avant de la souffrance civile vise à construire un récit politique : celui d’un conflit qui ne serait pas seulement militaire, mais profondément enraciné dans des dysfonctionnements structurels de l’État congolais. L’AFC/M23 cherche ainsi à se positionner comme une réponse à une crise devenue chronique, où l’insécurité s’est normalisée et où les mécanismes de responsabilité demeurent largement absents.

 Uvira, une affaire interne à forte portée régionale

À propos des événements survenus à Uvira, l’AFC/M23 insiste sur le caractère strictement « congolo-congolais » de la situation. Le mouvement rejette toute ambition transfrontalière et affirme respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des pays voisins, en particulier du Burundi. Cette précision intervient dans un contexte régional tendu, où toute évolution militaire à l’est de la RDC est susceptible de provoquer des crispations diplomatiques.

L’Alliance affirme que ses objectifs dépassent la conquête territoriale. Elle revendique une vision axée sur la paix, la protection des civils, la refondation de l’État congolais et la stabilité de la région des Grands Lacs. Au cœur de cette approche, l’AFC/M23 plaide pour un dialogue politique « sincère », capable de traiter les causes profondes du conflit, longtemps marginalisées selon elle.

 Le processus de Doha et le retrait unilatéral d’Uvira

Le 15 décembre 2025, l’AFC/M23 a franchi une étape majeure en annonçant son retrait unilatéral de la ville d’Uvira. Cette décision s’inscrit dans le cadre du processus de paix de Doha, marqué par la signature, le 15 novembre 2025, d’un accord-cadre présenté comme une avancée significative. Selon l’Alliance, ce retrait répond à une demande de médiation des États-Unis et constitue une mesure de confiance destinée à favoriser la désescalade.

Toutefois, ce retrait est assorti de conditions strictes. L’AFC/M23 exige la mise en place immédiate d’un mécanisme de protection efficace de la population, reposant sur le déploiement d’une force neutre et crédible. L’objectif affiché est de garantir le respect du cessez-le-feu et d’empêcher le retour de forces armées telles que les FARDC, les FDLR, les forces burundaises ou les milices Wazalendo. Le mouvement affirme que, par le passé, ses initiatives de retrait ont été exploitées par ses adversaires, entraînant de nouvelles violences contre des civils perçus comme favorables à l’Alliance.

En formulant ces exigences, l’AFC/M23 place les garants internationaux du processus de Doha face à leurs responsabilités, les appelant à transformer les engagements diplomatiques en mécanismes concrets de protection.

 Un message direct aux FARDC et aux milices locales

Dans un ton particulièrement critique, Corneille Nangaa s’est également adressé aux Forces armées de la RDC (FARDC), dénonçant ce qu’il décrit comme une instrumentalisation politique et une dévalorisation systématique des soldats. Selon l’AFC/M23, les militaires seraient à la fois sacrifiés sur le terrain et stigmatisés par les autorités qu’ils servent. Le mouvement les appelle à rejeter cette situation et à soutenir un projet de transformation visant à bâtir une armée nationale professionnelle et digne.

Un message similaire est adressé aux groupes armés locaux regroupés sous l’appellation Wazalendo. L’AFC/M23 les accuse d’être manipulés au nom d’un patriotisme « déformé » et les exhorte à reconsidérer leur engagement dans une perspective qu’elle présente comme un projet national de libération.

 Entre stratégie de légitimation et réalités du terrain

À travers cette communication renforcée, l’AFC/M23 cherche clairement à dépasser l’image d’un simple acteur armé. En s’appropriant le vocabulaire du dialogue, de la paix et de la protection des civils, l’Alliance tente de se repositionner dans le débat politique national et international.

Reste que la réalité sur le terrain demeure implacable. Les violences persistent, les civils continuent de payer le prix le plus lourd et la méfiance entre les différents acteurs reste profonde. Le succès du processus de Doha dépendra moins des déclarations que de la capacité réelle des parties prenantes, nationales et internationales, à garantir la sécurité des populations et à engager un dialogue politique inclusif.

Uvira apparaît ainsi comme un test décisif : pour l’AFC/M23, pour le gouvernement congolais et pour une communauté internationale régulièrement accusée d’impuissance face à l’un des conflits les plus durables du continent africain.

Afrovera.com poursuivra son suivi de l’évolution du processus de Doha et de ses implications politiques, sécuritaires et humanitaires en République démocratique du Congo.

NOTE ÉDITORIALE – AFROVERA

Cet article s’appuie sur des déclarations publiques et des documents officiels émanant de l’Alliance Fleuve Congo (AFC/M23). Afrovera.com s’engage à fournir une analyse contextualisée, rigoureuse et indépendante des dynamiques de conflit et de paix dans la région des Grands Lacs.

AFC/M23, Uvira et le processus de Doha : entre conflit armé, protection des civils et recomposition politique en RDC

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